Keisho Ohno est un célèbre joueur de Tsugaru Shamisen originaire de Niigata.
Il débuta son apprentissage à l’âge de 8 ans auprès de Chikuei Takahashi, disciple de Chikuzan Takahashi, le grand maître fondateur du Tsugaru shamisen. La pratique de cet instrument traditionnel lui fut enseignée comme s’il avait été son petit-fils, transmettant à la fois cet art musical et l’amour d’une sonorité si particulière et unique.
Très rapidement, son rythme de travail s’accélère. À l’âge de 12 ans, il passe au rang de Natori (titre lui permettant de porter une partie du nom de son maitre lors de ses représentations). À 14 ans, il est considéré comme l’un des « successeurs de l’ordre Chikuzan Bushi ».
Après ces petites précisions plus que nécessaires, place à l’interview !
ZERO YEN : Pouvez-vous en quelques mots, nous parler du Tsugaru Shamisen ?
Keisho Ohno : Cet instrument est arrivé à Okinawa il y a environ 400 ans. Il s’est ensuite petit à petit développé vers Osaka et ses alentours ainsi que dans le nord du Japon, pour arriver finalement dans la préfecture d‘Aomori et dans la région de Tsugaru d’où il tire son nom.
Composé d’un corps et d’un manche, c’est grâce à la taille de ce dernier que l’on peut différencier les « 3 sortes » de shamisen. Bien que ce soit un instrument traditionnel, certains matériaux utilisés à sa confection proviennent d’autres pays. Le bois, par exemple, vient directement d’Inde, offrant ainsi une sonorité plus claire et stable.
Le plus petit des shamisen est traditionnellement utilisé par les femmes ou les geishas, comme on peut le voir dans les vieux films japonais. Il a finalement évolué vers une version plus longue que l’on appelle le Tsugaru shamisen.
Cet instrument composé de 3 cordes en soie pèse environ 7 kg, ce qui, à priori peut sembler léger, mais je vous assure qu’après l’avoir pratiqué avec acharnement pendant plusieurs heures, le tout devient lourd à porter. (Rires)
ZY : D’où vous est venue l’idée d’adapter la musique traditionnelle japonaise avec des sonorités plus récentes ?
Keisho Ohno : Il est très difficile d’écouter du shamisen pour les néophytes ! Le son de cet instrument n’est pas accessible à toutes les oreilles. Je voulais donc faciliter l’accès à ce style de sonorités en mélangeant divers genres pour inciter mes fans à écouter petit à petit quelque chose de plus traditionnel.
ZY : Certains considèrent que vous apportez un style de musique plus progressif. Qu’en pensez-vous ?
Keisho Ohno : C’est un honneur ! Inclure ce style progressif est un moyen pour moi d’intéresser les gens et de démocratiser la musique du Tsugaru shamisen.
ZY : 2013 rime avec un second album européen intitulé SPARK. Pouvez-vous nous en parler ?
Keisho Ohno : En 2011, j’ai sorti mon premier album intitulé KAMOME dans toute l’Europe mais à cette époque-là, j’étais au Japon. Pour cette seconde galette, SPARK, j’ai travaillé en France afin de m’inspirer de votre culture. Il est donc à mes yeux plus personnel.
ZY : Votre site officiel et votre page MySpace sont trilingues (japonais / anglais / français). Quels sont vos liens avec la France et les pays francophones ?
Keisho Ohno : Je porte depuis très longtemps un grand intérêt pour la France. C’est un pays avec beaucoup de traditions. Un point commun avec moi qui les défends bec et ongles. En ce sens, mon esprit et celui des Français sont liés !
ZY : Vous avez participé à plusieurs conventions dans l’hexagone. Quels sont vos souvenirs les plus marquants ?
Keisho Ohno : Effectivement ! Il y a deux ans, j’ai joué à Paris lors de Japan Expo. La scène était très jolie et il y avait plus de 5000 places. C’était juste énorme !
ZY : Comment s’est passé votre concert ici au Mang’Azur?
Keisho Ohno : C’était super ! En général, ça se passe toujours mieux dans le Sud. Nous avons déjà fait des concerts en Afrique ou en Espagne. Là-bas, le public est très actif, très énergique alors que dans le Nord, il bouge un peu moins.
ZY : Les cordes de soie qui composent votre instrument peuvent s’étendre ou se rétrécir en fonction de la température ambiante. Comment gérez-vous ce problème lors de vos représentations un peu partout dans le monde ?
Keisho Ohno : En fait, les cordes vivent. (rires) Je préfère ne pas en utiliser des neuves mais des plus anciennes. Celles-ci produisent des sonorités plus simples et plus claires. J’ai toujours beaucoup de stock.
Comme vous l’avez dit, selon les températures, les cordes bougent et s’étendent, donc entre chaque morceau, je dois accorder mon shamisen. Je peux le faire jusqu’à 20 ou 30 fois durant un concert. Je n’ai pas le choix.
Les cordes cassent beaucoup plus souvent ici qu’au Japon, il m’est même arrivé de casser un instrument.
ZY : Avez-vous des projets ? Si oui, lesquels ?
Keisho Ohno : Nous allons certainement faire une tournée au Japon avec mes musiciens qui sont européens. Et j’aimerais, si possible, enchaîner sur une autre série de live sur le vieux continent, histoire de terminer en beauté.
ZY : Un dernier mot pour nos lecteurs ?
Keisho Ohno : Je voudrais vous remercier pour cette interview et pour votre sympathie. Merci pour votre soutien ! À très bientôt !
ZY : Merci ! À très bientôt !
Interview réalisée par Laurie Bernard