Pour ce 5e numéro des chroniques de notre rédac’ chef, deux séries sont à l’honneur : City Hall et Green Blood. De la qualité et non pas de la quantité, c’est un peu le mot d’ordre de la team pour cette édition !
City Hall
Éditeur : Ankama
Auteurs : Guillaume LAPEYRE et Rémi GUERIN
Nombre de volumes VF : 4 (en cours)
Série terminée : non
Note :
Résumé :
Imaginez un monde où tout ce que vous écrivez prendrait vie. Imaginez maintenant qu’un individu utilise cette arme avec les plus sombres desseins… À situation exceptionnelle, mesure exceptionnelle, les forces de police de City Hall n’ont d’autre choix que de faire appel à deux des plus fines plumes de Londres : Jules Verne et Arthur Conan Doyle !
Avis de Sébastien
Ah, qu’elle est loin l’époque où la guerre entre fans de BD franco-belge et de manga battait son plein ! Un temps révolu où il faisait bon se traiter de tous les noms pour défendre sa passion. Depuis les choses ont bougé, évolué et les BD nippones ont peu à peu envahi les étals de nos magasins préférés de France et de Navarre ! De cette bataille acharnée est née une nouvelle génération d’auteurs maitrisant parfaitement les codes de ces deux différentes écoles du neuvième art. Ce petit historique pour finalement nous amener au sujet de cet article : City Hall. Une pure production française qui sent bon la fleur de cerisier ! Si avec ça, je ne vous ai pas donné l’envie de lire la suite de cet article, je ne peux plus rien pour vous !
Imaginez, chers lecteurs, un monde dans lequel tout ce que vous écrivez prend vie ! Suite à ce phénomène des plus étrange et à ce que pourrait engendrer un tel pouvoir à la portée du plus grand nombre, une solution radicale a été prise ! Le stock national de papier (un matériau jusqu’alors indispensable), la recette de sa fabrication ainsi que tous les objets permettant de griffonner (des mots doux) ont été détruits à tout jamais ! Et là, on est quand même en droit se poser une question existentielle des plus importantes : mais comment font nos héros pour aller aux toilettes ? Utiliseraient-ils les trois coquillages ou bien les fameux W.C. japonais ? Une énigme qui reste encore à ce jour sans réponse. Mais encore une fois, je m’égare ! L’heure est grave ! Le plus grand esprit criminel de ce siècle, Black Fowl, serait visiblement en possession de ce fameux « papier » et s’en servirait pour mettre la ville à sac ! À situation exceptionnelle, mesure exceptionnelle : il est donc tant d’appeler nos deux héros à la rescousse. J’ai nommé : Jules Vernes et Arthur Conan Doyle ! (les protagonistes sont pour la plupart des personnages de fictions célèbres ou des figures historiques).
Autant vous prévenir tout de suite (après, il sera trop tard), nos comparses ont su avec brio prendre le meilleur de ces deux univers (la BD franco-belge et le manga) pour en faire une fusion des plus réussie. Ici, pas d’histoire à rallonge à la Shonen Jump ! Ben quoi ? Au bout de cinquante tomes de « Naruto » et, même si on ne le déteste pas trop, on commence en avoir ras la nouille ! Les histoires de « City Hall » se lisent en cycle de trois tomes, ce qui permet une maîtrise totale du scénario, évitant les histoires à rallonge. Le lecteur peut ainsi rejoindre l’aventure en route sans pour autant se ruiner !
Les personnages principaux sont travaillés, les dialogues savoureux, nos héros irrésistibles. Une rigueur dans l’écriture que l’on retrouve généralement dans des œuvres bien de chez nous ! L’ambiance steampunk et les lieux choisis pour la narration confèrent à cette œuvre une identité unique.
Côté influence nippone, on notera, pour la énième fois, l’utilisation du papier (« Wingman », « Death Note ») comme instrument du pouvoir. La plume est toujours plus forte que l’épée, c’est dit ! Un clin d’œil assumé de notre talentueux tandem aux créateurs du « Death Note ». Et il suffit de regarder rapidement la patte graphique de notre Guillaume Lapeyre national pour voir combien le monsieur vénère Takeshi Obata. La ressemblance frappante de style n’est pas un handicap, bien au contraire. Le découpage des planches est ultra dynamique, nous plongeant ainsi au cœur de l’action, le tramage léger et le coup de crayon assuré.
En résumé et pour faire court, « City Hall » est une série qui n’a rien mais alors rien à envier à ses homologues japonais ! Et si vous n’avez pas encore lu les trois premiers volumes de cette excellente création made in France, il est encore temps de corriger le tir ! D’autant plus qu’au moment où vous lirez ses lignes, le tome 4, marquant le début d’un nouveau cycle, sera aussi disponible. Ah, qu’est-ce que j’aimerais voir un jour une adaptation animée de nos héros !
Sur ce, les amis, je m’en vais imaginer quelques histoires bien coquines avec mon beau stylo et mon cahier Clairefontaine, en espérant que celles-ci prennent vie ! Faut bien que j’occupe mes soirées, non ?
Green Blood
Éditeur VF : Ki-oon
Auteur : Masasumi KAKIZAKI
Nombre de volumes VF : 2
Nombre de volumes VO : 5
Série terminée : oui (en VO)
Note :
Résumé :
À Manhattan à la fin du XIXe siècle, misère, criminalité et prostitution ravagent le quartier de Five Points, immense ghetto où échouent tous les laissés-pour-compte du rêve américain. La pègre, qui a corrompu les autorités, y fait régner sa loi. Au sein de la marée d’immigrants qui transitent par New York jour après jour, le jeune Luke Burns s’efforce de rester honnête et joue les dockers pour survivre.
Il sait, comme tout le monde, que le clan mafieux le plus dangereux de la ville, les Grave Diggers, s’appuie sur des assassins impitoyables pour asseoir son autorité. Mais ce qu’il ignore, c’est que le plus célèbre et le plus redoutable d’entre eux, le Grim Reaper, n’est autre que son frère aîné, Brad…
Avis de Sébastien
Après s’être frotté à l’univers carcéral avec « Rainbow » et au genre horrifique dans « Hideout », Masasumi Kakizaki nous revient avec un p’tit western sushi des familles, le tout saupoudré de guerre des gangs. De quoi régaler nos amateurs de poudre noire !
New York, des immigrants en provenance d’Europe arrivent de tous bords pour goûter aux joies du rêve américain ! Le même idéal qui fait fantasmer nos amis de l’excellent film de Michael Bay, « No pain No gain ». Aucun rapport avec cet article me direz-vous ! Eh bien, cher lecteur, vous avez raison ! Mais voilà, une fois arrivés, la réalité s’avère être toute autre. Victimes de discrimination, une vie rude et misérable attend nos pauvres compatriotes qui n’auront d’autre option que de séjourner dans un bidonville appelé « five points ». Et c’est dans ce petit « quartier résidentiel » où seul s’applique la loi du plus fort, que nos principaux protagonistes essaient de survivre.
Après quelques superbes pages d’ouverture (en couleur s’il-vous-plaît), nous retrouvons donc Luke Burns, un jeune comme on n’en fait plus ! Positif et travailleur, il ne cède pas à la tentation de rentrer dans un gang, malgré la dureté de son quotidien. Mais nul n’est parfait et ce dernier a visiblement du mal à s’empêcher de jouer au justicier pour sauver la veuve et l’orphelin ! N’est pas Batman qui veut, nom d’une pipe ! Heureusement que son grand frère veille sur lui pour le tirer des situations les plus périlleuses (Ikki, sors de ce corps !). Si celui-ci semble être un sacré bon à rien, il est en fait, une fois la nuit tombée, le « Grim Reaper », un assassin impitoyable à la solde des « Grave Diggers », un des plus dangereux clans mafieux de la ville. Maman, j’ai peur !
Même s’il est terriblement efficace à première vue, ce n’est pas par son scénario que brille « Green Blood ». Les stéréotypes s’enchainent et se ressemblent. Les méchants ont des tronches de méchants et se feraient coffrer de nos jours en deux-deux pour délit de sale gueule ! Celle de Luke par contre est presque angélique, collant ainsi à sa naïveté affligeante. Ne pas s’apercevoir que son frère est un redoutable tueur, c’est un peu comme ne pas être au courant que Clark Kent est Superman. Un comble ! Notre « Grim Reaper » poursuit un mystérieux dessein qui lie étrangement son père et le chef des « Grave Diggers ». Pour couronner le tout, notre tueur à gage semble souffrir du syndrome « Pretty Woman ». Vu les attributs de la belle, on ne peut que lui pardonner. Oui, je sais, je suis faible !
Le point fort de cette œuvre reste sans aucun doute la mise en scène ingénieuse du mangaka. Si le découpage des cases est somme toute classique, les gros plans sur les visages, les yeux, les simple ou doubles pages figées (ce procédé rappelant les réalisations d’Osamu Dezaki dans des animés comme « Black Jack » ou « Space Adventure Cobra ») renforce l’immersion totale du lecteur dans le récit. Et permet ainsi à porter la jauge de « cool attitude » de notre hitman au maximum !
Les scènes d’action sont assez sèches, rapidement exécutées et finissant toujours par quelques gerbes de sang bien placées. Elles nous rappellent que la vie d’un habitant de « five points » ne vaut pas grand-chose. Le trait unique de l’auteur, ses jeux d’ombres et son travail sur les trames donnent à cette série une ambiance unique, que dis-je une âme bien à elle !
« Green Blood » est une très bonne surprise et démarre sur les chapeaux de roues. Méritant donc largement tous les efforts que l’éditeur a faits pour mettre en avant cette œuvre. Reste à savoir maintenant comment va évoluer l’intrigue tout au long des 5 volumes qui composent la série. Mais « pour une poignée de dollars », je suis sûr que vous vous laisserez séduire par ce nouveau manga estampé Ki-oon.